Objet : Demande de déblocage de comptes d’utilisateurs sur la page publique Facebook « Ville d’Idron »
Monsieur Nahon,
Lors de la période du confinement, Madame Annie HILD, maire sortante d’Idron, a souhaité proposer aux administrés un nouvel outil de communication et ouvert à tous, via le compte Facebook de la commune d’Idron. Ce compte est par conséquent public.
Dans la même optique, un projet de modernisation du site internet de la commune avait été lancé et concrétisé par la suite, à la satisfaction générale.
Le réseau social Facebook est un outil intéressant d’information, d’échanges et de discussion entre une communauté d’utilisateurs s’intéressant à la vie sociale, culturelle, économique ou politique d’une même commune faisant vivre le débat démocratique.
Consciente de possibles dérives de certains commentaires sur ce type de réseau social, Madame la Maire a souhaité configurer le compte Facebook permettant un filtrage élevé de mots dits « injurieux ». C’est une fonctionnalité classique, conformément à la réglementation en vigueur.
Cependant, jamais le premier magistrat précédent ne se serait autorisé à bloquer du compte public Facebook de la commune, de manière délibérée, des administrés opposés à la politique menée, et ce, au nom de la liberté d’expression et du respect de nos valeurs démocratiques qu’un Conseil municipal doit promouvoir, avant tout.
Or, depuis le mois de juin 2020, l’équipe « Idron au cœur » a été informée que plusieurs habitants de la commune ou de l’agglomération paloise ont été bloqués de toute possibilité de commenter les actualités, articles et divers posts émis sur le compte public Facebook de la commune d’Idron. De plus, de nombreux commentaires publiés, respectueux et critiques[1], ont été supprimés par le modérateur de la commune, c’est-à-dire, semble-t-il l’adjoint à la communication ou la commission « Communication, développement numérique et internet », présidée par vous-même[2].
Parmi ces citoyens bloqués figure deux anciens membres du Conseil municipal de la commune à savoir, Madame Caroline LADOIS, adjointe pendant près de 12 ans au sein du groupe scolaire « Les Platanes » et Monsieur Julien GEVREY, conseiller municipal et ancien président du CCAS. D’autres membres de la liste « Continuons Idron » ainsi que divers électeurs subissent également cette décision de blocage par la nouvelle « majorité » municipale.
Pour votre information, l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (ci-après DDHC) du 26 août 1789 précise que la « libre communication des pensées et des opinions est un droit des plus précieux de l’Homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi ».
La liberté d’expression est en effet l’un des droits les plus élémentaires dans une démocratie. Dès lors, le Conseil constitutionnel a estimé que l’exercice « du droit de libre communication et de la liberté de parler, écrire et imprimer »était une liberté fondamentale ayant une valeur constitutionnelle. L’exercice de cette liberté d’expression est « l’une des garanties essentielles du respect des autres droits et libertés et de la souveraineté nationale »[3]. Plus récemment, le Conseil constitutionnel a précisé que « la liberté d’expression et de communication, […], est d’autant plus précieuse que son exercice est une condition de la démocratie et l’une des garanties du respect des autres droits et libertés »[4].
Dès lors, la liberté d’expression ayant une valeur constitutionnellement garantie, les collectivités territoriales y sont soumises.
Aussi, l’article 10 de la CEDH stipule que « toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques ».
« La liberté d’expression constitue l’un des fondements essentiels d’une société démocratique, l’une des conditions primordiales de son progrès et de l’épanouissement de chacun. Ainsi le veulent le pluralisme, la tolérance et l’esprit d’ouverture sans lesquels il n’est pas de société démocratique »[5].
Plus spécifiquement, concernant l’accès à internet et la liberté de recevoir et communiquer des informations, la Cour européenne des droits de l’homme précise « qu’internet est aujourd’hui devenu l’un des principaux moyens d’exercice par les individus de leur droit et liberté de recevoir ou communiquer des informations ou des idées. […] La possibilité pour les individus de s’exprimer sur internet constitue un outil sans précédent d’exercice de la liberté d’expression »[6].
En l’espèce, les commentaires effectués par tout citoyen Idronais sur le compte public Facebook de la commune sont la caractérisation de la liberté d’expression, c’est-à-dire, de la liberté d’écrire et de donner son opinion sur un sujet ou une action publique de la collectivité locale, favorisant ainsi le débat démocratique et la transparence.
De surcroit, le législateur peut porter atteinte au principe de la liberté d’expression dans des cas précis et limités.Ces mesures restrictives « doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l’objectif poursuivi »[7].
C’est le cas du droit au respect de la vie privée[8], des limites fixées par le droit pénal national comme les propos diffamatoires[9], ou encore la préservation de l’ordre public[10].
Les atteintes portées par le législateur sont également inscrites à l’alinéa 2 de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme. Autrement dit, les atteintes à la liberté d’expression prévues par la loi nationale doivent poursuivre un but légitime et nécessaire dans le cadre d’une société démocratique.
A titre d’exemple, la justification de la violence voire d’apologie de la violence[11], la publication de commentaires à connotation homophobe[12], discours haineux ou propos négationnistes et révisionnistes[13].
En l’espèce, la nouvelle municipalité d’Idron peut-elle justifier que les derniers commentaires effectués sur le Facebook de la commune par des citoyens ou anciens élus sont diffamatoires ou trouble l’ordre public ? En aucun cas !
Il s’agissait de commentaires respectueux et non diffamatoires, de remerciements des actions et projets initiés par Madame Annie HILD, maire sortante réélue par les électeurs, pour son action efficace, sincère et loyale des affaires communales depuis plus de 20 ans.
Le compte public Facebook de la commune d’Idron doit rester un outil d’information, d’échange et de communication ouvert à tous sans discrimination d’opinion politique avec pour principe sous-jacent la liberté d’écrire et de commenter.
Le compte public Facebook doit rester un lieu de débat, de nuance, d’ouverture aux autres sans que les voix « discordantes » soient « effacées ». C’est l’essence même de la démocratie.
L’ÉQUIPE IDRON AU CŒUR DEMANDE LE DÉBLOCAGE IMMÉDIAT DES UTILISATEURS CITOYENS ET NOTAMMENT ANCIENS ÉLUS CENSURÉS.
L’ÉQUIPE IDRON AU CŒUR SOUHAITE QUE CESSENT CES MANŒUVRES DE DÉSTABILISATION PERMANENTES.
L'équipe "Idron au coeur"
Caroline LADOIS, Julien GEVREY, Dorian FERREIRA et Guillaume BOISOT
[1] N’oublions pas que la critique peut être positive ou négative.
[2] Suite à la délibération du Conseil municipal de la commune d’Idron du 29 juin 2020, les membres de la commission « Communication, développement numérique et internet » sont M. Nahon, M. Boueilh, Mme Pinaud, Mme Bouder, Mme Pourtau et Mme Bouziat.
[3] Conseil Constitutionnel, décision n° 84-181 DC du 11 octobre 1984.
[4] Conseil Constitutionnel, décision n° 2019-780 DC du 4 avril 2019.
[5] Fiche thématique, Cour EDH, Unité de la presse, juin 2020.
[6] Cour EDH, arrêt Cenzig c. Turquie, req. n° 48226/10 et 14027/11, 1er décembre 2015.
[7] Conseil Constitutionnel, décision n° 2019-780 DC du 4 avril 2019.
[8] Cour de cassation, civ. 1ère, 11 mars 2020, n° B 19-13.716.
[9] Loi du 29 juillet 1981 relative à la liberté de la presse.
[10] Conseil d’Etat, ord., réf., 9 janvier 2014, n° 374508.
[11] Cour EDH, arrêt Altintas c. Turquie, 10 mars 2020, req n° 50495/08.
[12] Cour EDH, arrêt Lilliendahl c. Islande, req. n° 29297/18, 12 mai 2020.
[13] Cour EDH, arrêt Garaudy c. France, 24 juin 2003, n° 65831/01.
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